Un
nouveau palier a été franchi, nous avons assisté le
dimanche 15 octobre 2017, lors de l’émission « Le Grand
Entretien », à l’ une des interventions médiatiques les plus pénibles du nouveau chef de l’Etat ; plus pénible que
ses cris de chouettes et ses incantations lors de la campagne présidentielle,
plus pénible que sa marche interminable le soir de l’élection, plus pénible que
ces petites phrases méprisantes à l’égard d’une grande partie de ses
concitoyens (de l’étranger qui plus est), plus pénible que son idéologie
développée dans l’entretien fleuve au point… je comprends maintenant pourquoi
il hésitait tant à parler aux français : la peur de dissiper l’écran de
fumée qui l’entourait et qui pouvait encore le
préserver. Le logiciel néo libéral est vraiment bien installé et le
système d’exploitation fonctionnel ; malheureusement aucune écoute de sa
part, l’apprentissage profond n’est pas encore au point et aucune mise à jour
n’est prévue avant 5 ans. Un petit résumé du « macronisme » pourrait
être un appel illuminé à la grandeur, à « la libération des
énergies », à « l’héroïsme en politique » associé à une
condamnation de notre pessimisme et de nos « passions tristes »
délétères pour la nation ; traduction : application concrète d’un énorme coup de bâton fiscal
largement déséquilibré en faveur des plus aisés sans aucune garantie
d’investissement et de baisse du chômage. Quelle différence entre les paroles,
la « hauteur de vue » et les actes concrets ! Demandez leur avis
aux fonctionnaires, aux salariés du privé, aux retraités ou encore aux maires.
Pour ceux qui pourraient trouver un peu
exagéré le titre de cette bafouille, je me propose de bien définir les termes
qui pourraient prêter à confusion. Selon le Petit Robert, « inhumain »
signifie « qui manque d’humanité », caractéristique particulièrement
criante chez ce président avec cette forme de distance, de froideur qui se
dégage de sa personne ; je reviendrai d’ailleurs sur ce point un peu plus
loin.
Pour
ce qui est de l’intelligence, au delà de la définition générale :
« faculté de connaître, de comprendre », rappelons que le psychologue
Howard Gardner à identifier 8 types d’intelligences (cf l’article wikipédia
« Théorie des intelligences multiples ») : intelligence
linguistique (capacité à utiliser les mots et les nuances de sens ),
intelligence logico-mathématique (capacité de manipuler les nombres et de
résoudre les problèmes logiques), intelligence spatiale (capacité de trouver
son chemin dans un environnement donné, et d’établir des relations entre les
objets dans l’espace ), intelligence corporelle-kinésthésique ( capacité
d’utiliser le contrôle fin des mouvements du corps ) , intelligence interpersonnelle
( capacité de comprendre les autres, de communiquer avec eux et
d’anticiper l’apparition d’un comportement ) , intelligence intra-personnelle
(capacité de se former une représentation de soi précise et fidèle et de
l’utiliser efficacement dans la vie), intelligence musicale (capacité de
percevoir et de créer des rythmes et des mélodies) et intelligence naturaliste
(capacité de reconnaître et de classer la faune, la flore et les
minéraux) . Dans le cas présidentiel qui nous intéresse on peut
facilement se rendre compte qu’il est
possible de développer de bonnes intelligences logico-mathématique,
linguistique et même musicale (il joue très bien de la flûte) et « en même
temps » d’être limité en terme d’intelligence interpersonnelle (petites
phrases, blagues douteuses et écarts de langages en fonction de
l’interlocuteur), d’intelligence naturaliste (faible intérêt pour la question
environnementale en dehors des slogans) ou d’intelligence spatiale (pour la
Guyane par exemple, lors d’un mouvement social, il a parlé du fait de
« bloquer le fonctionnement de l’île »). Les meilleurs comptables ne
font pas forcément les meilleurs meneurs d’homme, il aurait dû se cantonner à
son rôle de ministre de l’économie ; au moins dans ce cas il est encore
possible de limiter les excès d’inhumanité d’un idéologue égocentré.
D’ailleurs, en ce moment Le Maire et Darmanin auraient bien besoin de limites.
Enfin l’adjectif « artificiel »
qualifie ce qui est « produit par la technique, par l’activité humaine finalisée,
et non par la nature ». J’ai noté chez lui le déroulement d’une logorrhée
apprise faite de répétitions, de tics langagiers et de stratégies rhétoriques
masquant difficilement un grand vide, un manque de sens et de direction
concrète. Toutes ses références littéraires, philosophiques ou historiques sont
autant d’artifices intellectuels destinés à habiller un esprit contrit
incapable d’altérité sincère. Il me paraît inadapté au relationnel humain en
dehors de son milieu politique et social d’appartenance.
Le « grand » entretien évoqué me
semble particulièrement intéressant car il s’agissait de la première fois
depuis le début de sa communication ratée qu’il s’adressait à nous autres
pauvres bougres français sans ambitions qui ne souhaitons même pas être
milliardaires (pour lui nous n’en sommes sûrement pas capable
d’ailleurs) ; l’objectif reconnu de cet exercice pédagogique étant la « clarification »
de sa ligne directrice, le moins que l’on puisse dires est que je n’ai pas été
déçu.
« A la fin des fins, les décisions
stratégiques sont prises par le président de la République. Pourquoi ?
Parce qu’il a reçu le mandat des françaises et des français… » Aïe, ça
commence mal, sacré manque d’égard pour tous ces individus ayant voté pour lui
seulement par peur du FN et pas du tout par adhésion à ses idées. Que dire de
tous les abstentionnistes, ces personnes ayant choisi le bulletin blanc ou nul,
ne sont-ils pas français ? Si je comprends bien, ne pas voter dans cette
démocratie c’était donc lui donner ce mandat ; intéressant comme théorie,
notre démocratie serait bien malade en fin de compte ! A quand la
reconnaissance du vote blanc pour éviter ce genre d’ineptie à l’avenir !
«J’ai
toujours essayé de dire les choses depuis que je suis engagé dans la vie
politique et de m’approcher d’une forme de vérité, celle que je pensais
juste » ou encore « parfois quand on s’approche de la vérité on se
brûle », inquiétant… personne ne lui a dit qu’il n’était pas le détenteur
de la vérité que personne ne pouvait l’être d’ailleurs (n’est-il pas un
président philosophe selon ses groupies ?), qu’il pouvait se
tromper ; il est déjà Jupiter, il nous dit de « ne pas céder aux
Cassandre », ne se prendrait-il pas
aussi pour la Pythie, prêtresse de l’oracle de Delphes ? Pour un apôtre de
« l’en même temps » tout est possible.
Ensuite, intervient un long retour sur les
qualificatifs peu amènes employés lors de sorties médiatiques frisant l’accident
rhétorique : « cyniques », « fainéants »,
« fouteurs de bordel »,
« extrêmes ». Mention spéciale à cette fameuse phrase :
« Une gare c’est un lieu où l’on croise des gens qui réussissent et des
gens qui ne sont rien. » Le président se plaint alors aux
journalistes : « Quand on sort le texte du contexte, le mot du
discours on peut tout faire dire. » J’attends alors cette fameuse remise
en contexte pour juger de pertinence de cette plainte, elle ne se fait pas
attendre et il explique « Nous étions dans un hall de gare. »
Pas plus ? En quoi cette réponse plus que légère change-t-elle quoique ce
soit au sens de la phrase ? Pensée complexe sans doute, message subliminal
que je ne maîtrise pas en référence à la gare. Pas du tout convaincant en tout
cas. Pas bien grave, pas de reprise, on continue. Certains s’étonnent que l’on
s’offusque de son parlé « cru », « dru », de son
« discours de vérité » ; je pense qu’il est tout simplement
incapable de s’adresser aux individus extérieurs à son milieu. Pour s’adresser
au peuple il utilise un registre populaire ? A quand le « verlan »
dans les quartiers ? Comme si nous n’étions pas capable de le comprendre
dans son style soutenu lorsque nous sommes originaires de la périphérie de
Paris. Personnellement cela a le don de m’agacer au plus haut point, ayant
moi-même grandi dans le Val d’Oise, dans une banlieue que je qualifierai de
fleurie, je pense avoir eu accès tout de même à un minimum d’éducation. J’ai
bien sûr subi un certain nombre d’influences qui ont conditionné mon expression
orale, j’ai pris souvent quelques libertés avec la langue de Molière, j’ai
fréquemment fait des arrangements avec les règles les plus élémentaires de la
rhétorique mais toujours dans un cadre bien défini. Oui nous sommes capables de
faire la différence entre sphère privée et sphère publique, oui nous sommes
capables de saisir l’importance d’un discours solennel, oui nous entendons que
certains moments importants nécessitent que l’on soit capable de maîtrise et de
mesure langagière. Respectez nous ! Ne nous infantilisez pas ! Si
votre vocabulaire d’énarque est trop complexe, ne vous inquiétez pas, ce
superbe ouvrage qu’est le dictionnaire de la langue française nous est tout à
fait accessible même si nous n’avons pas à disposition celui de l’académie
française !
Maintenant, retour satisfait et exalté sur
son grand projet : « la transformation ». Mais vers quoi bon
sang ?!!? « Transformation radicale pour que chacune et chacun trouve
sa place dans notre société. » Mais quelle place ?!!? Pour
qui ?!!? N’était-ce pas une tentative de clarification ? Ça ressemble
plutôt à un enfumage encore plus flagrant que d’habitude ?
Lors de l’évocation du taux de chômage et
de la réforme du code de travail nous avons pu entendre, en réponse aux
questions insistantes des journalistes : « Le taux de chômage n’est
pas une variable qu’on ajuste. » Merci pour l’information, même si la
lutte contre le chômage était l’une des justifications les plus avancées afin
de légitimer les fameuses réformes ; on nous aurait menés en bâteau ?
Il est pourtant si sincère d’habitude. Ou encore « La plénitude des
réformes qui sont en train d’être conduites par le gouvernement vous le verrez
dans un an et demi, deux ans » ; « On ne juge pas de l’action
d’un président simplement à un
indicateur (le taux de chômage) » Si je comprends bien nous devons
supporter un grand nombre de mesures très brutales sans aucune garantie de
retour en termes d’emploi (les spécialistes sont d’ailleurs nombreux à mettre
en garde contre une possible nouvelle crise financière à laquelle nombre de
concitoyens ne pourraient pas résister si l’on remet en cause de la sorte notre
modèle social). Pour lui c’est gagnant- gagnant : si le chômage a baissé
dans deux ans ce sera grâce à ses mesures, si le chômage a augmenté, il ne faut
pas le juger sur ce critère, la conjoncture économique sera responsable. Ne
serait-il pas un peu fourbe ?
Il aura eu au moins un bon conseil de son
équipe de communication, lorsqu’il se justifie par « Sur tout, je fais ce que
je dis. », heureusement il ne va
pas plus loin contrairement à son entretien fleuve dans le quotidien allemand « Der
Spiegel » qui citait la veille : « Je ne suis pas arrogant, je
dis et je fais ce que je veux ». Un petit rappel me semble important, le
chef de l’Etat représente le peuple français donc il se doit de faire ce que
ses concitoyens attendent de lui, il n’a pas encore une légitimité de droit
divin, ne lui en déplaise. En lançant
« le peuple français a gagné parce que sa volonté à gagné. », il est
en totale contradiction avec les mots employés en Allemagne où il exprime
clairement le fait que c’est sa propre volonté qui prime. Accès de
schizophrénie ? Je me trompe sans doute, je dois juste être un peu trop tatillon.
Abordons maintenant le sujet de la
flexibilité du marché du travail associé à l’apprentissage et la formation
professionnelle ; une phrase a retenu mon attention : « on va
mettre de l’apprentissage y compris dans les filières d’excellence »
pourquoi les filières qui utilisent déjà ce système d’apprentissage ne
pourraient-elle pas plutôt devenir elle-même des filières d’excellence ?
Pourquoi ne pas imaginer faire des filières professionnelles dans le secondaire
des filières aussi reconnues et estimées que les filières dites
d’excellence ? Et bien non, avec lui il y aura toujours cette distinction
entre filières de « champions » et celles de ceux qui doivent se
contenter des restes. Pour moi, le plus affligeant est qu’il ne se rend même
pas compte de la violence de son idéologie élitiste déclinée sous toutes les
formes et dans tous les domaines. En référence à l’entrée dans la formation
universitaire, nous avons pu entendre « On va définir des attentes dans
une filière, des qualifications minimales », «On ne va pas s’engager dans
une filière universitaire lorsqu’on ne sait pas les fondamentaux qui permettent
d’y réussir. » Etonnant ce paradoxe de vouloir une société qui privilégie
la mobilité des salariés mais qui va bientôt empêcher la mobilité des étudiants
dans des filières de formation en orientant de plus en plus tôt et en limitant
les passerelles ; pas de droit à l’erreur à un âge ou beaucoup ne savent
même pas ce qu’ils veulent faire. Que
faire des vocations tardives, des motivations naissant sur le tas, des coups du
sort, des rencontres fortuites ?
Pour ce qui est de la formation des
chômeurs, autre morceau de bravoure : « Vous êtes par exemple au
guichet d’une banque, dans les 5 à 10 ans qui viennent, il y aura, à cause de
la transformation numérique et par la transformation numérique, un changement
des usages (…) beaucoup d’emplois vont être détruits, je ne vais pas proposer
de protéger celles et ceux qui ont ces emplois contre ce changement » ou
encore « La société change, je ne vais pas proposer de vous protéger
contre la société et son changement, je vais vous proposer de vous armer pour
trouver une place dans cette société qui change ». Tout d’abord merci pour
eux, ils doivent être ravis de savoir qu’ils ne seront pas protégés, et ce
n’est pas le fait de l’énoncer clairement qui rend la chose moins condamnable,
surtout pour le premier représentant de l’Etat dont l’une des fonctions est de
protéger ses concitoyens. Au delà de l’expression d’une pensée manquant
totalement d’empathie, on peut y voir le même type de clarification à l’œuvre
lors de ratés médiatiques marquants comme lorsque Jacques Attali, soutien de la
première heure s’il en est, disait à propos du mouvement social sur le site de
Whirpool à Amiens :
« C’est
une anecdote, non pas au sens péjoratif du mot… Ça s’inscrit dans un contexte
plus large, c’est à dire le contexte de la mondialisation ou de la
fermeture. » Un parallèle
est possible entre ces deux personnalités qui vantent la bienveillance et
l’épanouissement personnel de chacun (belle déclaration d’intention) tout en
reléguant des licenciements économiques à de simples dommages collatéraux
indispensables au bon développement d’un projet « grandiose ».
A la seule question claire posée à propos
du coût de la réforme visant à permettre aux salariés démissionnant
volontairement de toucher les ASSEDICS, pas de réponse mais une
certitude : « Nos concitoyens n’ont pas envie d’aller toucher le chômage. »
Quelle surprise alors de l’avoir entendu, au cours de ce même entretien,
qualifier le chômage de longue durée « d’exemple même de la faiblesse
française, on indemnise mais on dit au gens, parce qu’on donne de l’argent,
restez là, et on ne vous forme plus ». Je m’y perds avec tant de
complexité, il y aurait un effet d’aubaine pour certains mais pas lorsqu’on
décide de permettre une indemnisation pour des cadres voulant changer d’emploi,
cadres qui ont déjà plus facilement accès aux formations professionnelles.
Et
quelle belle présentation des avancées dans la prise en charge des chômeurs, quelle
rupture, la France va faire… ce qui se fait déjà : « bilan
personnalisé de compétence », « est-ce qu’il y a des offres qui
peuvent lui être données ? », « s’il y a des offres décentes,
raisonnables (…) alors il faut qu’on s’assure qu’il recherche bien de manière
active un emploi. » Bon résumé de ce que fait déjà pôle emploi… et, pour
finir, une belle stigmatisation des chômeurs affublés du qualificatif de « multirécidiviste » ;
peut-être qu’au lieu de suspendre les droits aux indemnités, il voudrait les
mettre en prison. Même logique pour les questions de sécurité nationale, aucune
prise de risque : « on va faire ce qu’on doit faire (…) reconduire
les personnes délinquantes en situation illégale ». Il ajoute tout de même
« protéger c’est la première mission de l’Etat » (sauf pour les
employés aux guichet des banques).
Autre moment très gênant, lorsque
j’apprends que le harcèlement à l’encontre des femmes était déjà rapporté par
« toutes les femmes en région parisienne » lors de sa consultation « la
grande marche » alors qu’il était seulement candidat. Comment expliquer
qu’il attende alors les déflagrations de l’affaire Weinstein pour commencer à
se mettre en marche sur le sujet ? Pourquoi ne pas s’être saisi de ce problème
même avant de penser aux fameuses ordonnances ? J’oubliais, il est vrai
qu’il y a des priorités, les questions de finances et de budget priment sur le
reste, je dois être vraiment mauvais en calcul !
Référence est faite à « la police de
sécurité et du quotidien » et son rôle dans les transports pour lutter
contre ce type de harcèlement fait aux femmes en localisant les méfaits
potentiels : « ce sont dans les quartiers les plus difficiles où les
magistrats ont énormément à faire »… hop, une nouvelle sortie de
route ! Allez, pourquoi se priver, stigmatisons encore les populations des
quartiers difficiles !!! L’affaire DSK, l’accusation contre Denis Baupin
de harcèlement et d’agressions sexuelles, les sifflements lors de la prise de
parole de Cécile Duflot pour une histoire de robe, les caquètements lors du
passage de Véronique Massoneau à l’assemblée nationale ; pour moi, nous
sommes plus proches du Ritz ou de l’Elysée que du train de banlieue, et je
pense par contre que dans ces hautes sphères de l’Etat les magistrats n’en font
peut-être pas encore assez ! Je ne demande pas du tout que l’on soit
complaisant à l’égard de certains comportements clairement inappropriés ou
condamnables en fonction du milieu social d’origine, je demande simplement que
l’on soit pour une fois juste et impartial dans le jugement et dans la manière
de présenter les choses.
Autre question directe concernant, la
PMA : pour ou contre ? Il ne répond pas, il se réfugie derrière les
décisions des commissions et lance même un très prévenant « sur ces sujets de société, le politique ne doit pas
brutaliser les consciences, les convictions profondes que je respecte chez
chacune et chacun » ; « je souhaite que nous ayons un vrai
débat » ; « je veux que nous ayons une conversation
apaisée ». Très bien, mais pour les
autres questions toutes aussi importantes il ne faudrait pas hésiter à user de
brutalité alors ? Le code du travail n’est pas un sujet sociétal assez
important ? Les APL pour les étudiants non plus ? Et la CSG pour les
retraités, pas besoin de débat apaisé ? Les classes populaires et les
classes moyennes se sentent bien brutalisées pourtant.
Au choix, point culminant de l’entretien ou
fond du trou et défaite de la pensée : sa référence à « la jalousie »
en France et l’image des « premiers de cordées ». Petit
florilège : « ce sont ce que j’appelle les passions tristes de la
France, la jalousie » ; « je ne crois pas à la jalousie
française » ; « je crois à la cordée » ; « si on
commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée, c’est toute la cordée
qui dégringole » ; « je
veux qu’il y ait des femmes et des hommes qui réussissent pour tirer les
autres » ; « je n’aime pas la jalousie qui consiste à
dire : ceux qui réussissent on va les taxer, les massacrer parce qu’on ne
les aime pas ».
Tout
d’abord je trouve nauséabonde son habitude de faire l’amalgame entre réussite
au sens large et réussite financière, la seule qui semble trouver grâce à ses
yeux. Il est tout à fait incroyable qu’il soit incapable de comprendre que
certaines personnes n’ont pas pour ambition d’être riches. Il y a tout de même
un juste milieu entre vouloir
« massacrer » les riches et les admirer en perdant toute rationalité.
Avec Macron nous pouvons voir où cela mène : une alliance indéfectible
avec des milliardaires. Imaginons un instant que quelqu’un comme Zuckerberg
arrive à la présidence des EU , cela risque de se terminer en dîner aux chandelles
avec mots doux à la clé (c’est déjà presque arrivé avec Trump en juillet
dernier).
Pour
tous ceux qui paient largement leur dû en terme d’impôt et qui, de par leur
domaine d’activité peu dépendant d’investissements financiers toujours plus
grands, n’ont en aucun cas l’impression d’être tirés par qui que ce soit, il
est bien difficile de subir les diatribes condescendantes d’un donneur de leçons
spécialiste dans les petites intrigues et les grandes affaires. De plus, s’il
s’agit, comme je le crois, de tirer sur la cordée pour mener ses concitoyens là
ou l’oxygène se fait rare, je ne peux que rejeter cette métaphore. Pour ceux
qui sont d’ailleurs considérés comme les premiers de cordée de la nation
Française, il a lui même évoqué « les jets de cailloux », il
semblerait que pour eux des casques renforcés comme celui des ouvriers qui
souffrent des visites présidentielles soient de mise.
Toujours
à propos de la jalousie et de l’idée d’envie : comment faire entendre qu’il
existe des individus qui ne placent pas les honneurs, le pouvoir ou la richesse
comme objectif de vie ; il existe bien des gens
« humbles » , et il n’y a rien de péjoratif dans l’emploi de ce
qualificatif, qui ne sont pas moins valables ; ils ont seulement des
valeurs et des principes différents. Je ne comprends pas cette dichotomie entre
gens riches et individus qui voudraient l’être. Les oubliés de la
« macronie » ne sont pas seulement les gens pauvres, se sont aussi
les gens humbles, simples, mesurés qui ne pourront plus se permettre de vivre
simplement comme ils le souhaiteraient. Pourtant ils sont souvent éduqués,
capables, « intelligents »
(concept complexe comme cela a déjà été évoqué) voir brillants. Je ne considère
pas qu’il faille être pauvre pour être honnête mais je ne crois pas non plus
qu’il faille être riche pour être valable. Ce n’est pas la richesse qui est
problématique, c’est simplement le fait de placer l’enrichissement personnel au
sommet de l’échelle des valeurs personnelles qui est désolant.
En
conclusion je vous livre donc ce que je retiendrais de son action derrière
l’expression de cette bouillabaisse mentale qu’il nous a servie pendant plus
d’une heure. Au delà des beaux mots, sous le vernis jupitérien qui ne demande
qu’à craqueler on peut tout résumer par un seul chiffre, 3, comme les 3% de
déficit que la France doit atteindre coûte que coûte, même si pour cela on doit
baisser les moyens des étudiants sans le sou, presser comme des citrons les
retraités, couper les vivre à des associations, licencier chez France
télévision, se mettre à dos tous les services publics… Pour tout ce qui ne
fonctionne pas pour lui, comme les emplois aidés, on supprime sans mesure des
conséquences et on verra plus tard pour les réparations. Par contre il faut que
nous comprenions bien, nous ignares, qu’il est nécessaire de renforcer « le
message positif que cette majorité (LREM) souhaite porter à l’égard des acteurs
économiques de premier plan que sont les entreprises » :
flexibilisation du marché du travail avec facilitation des licenciements,
réforme de l’ISF, flat taxe à 30%, suppression de la dernière tranche de
« la taxe sur les salaires » (concernant surtout banques et
assurances) , amendement sur la baisse des contributions patronales dans les
actions gratuites… ce n’est plus un message positif mais une déclaration
d’amour ! Le but est de transformer la société, de libérer les énergies,
s’adapter au changement profond… pas très clair tout ça, tant pis, si vous ne
suivez pas vous serez laissés sur le bas côté ; il faut aller se former là où il le souhaite, de toute façon les
portes d’entrée de certaines filières seront encore plus verrouillées et il
faudra se recycler au plus vite dans le secteur du numérique quel que soit
votre âge. Il s’agit de donner au plus vite le plus de moyens possible aux
financiers, aux entreprises donc aux investisseurs potentiels, sans aucune
contrainte ni garantie qu’ils n’investissent effectivement ; tout cela en
sacrifiant tout notre modèle social, les moyens et les conditions de vie des
classes populaires et moyennes ! Et pour les questions sociétales clivantes
comme la PMA il n’a pas d’avis, nous verrons plus tard…Vu la manière de
considérer son peuple, pas étonnant qu’il n’ait aucun scrupule à
« désosser » le code du travail, à stigmatiser les chômeurs, à
attaquer en règle la sécurité sociale. Quel décalage entre son image à
l’international ou il apparaît comme une sorte de représentation
fantasmagorique de l’idée d’espoir et de renouveau et son image à l’échelle
nationale ou il apparaît plutôt comme une grande faucheuse sociale adepte du
tout numérique. Dorénavant, sa stratégie d’éparpillement, de mouvement
perpétuel sans sens établi semble caduque, cette clarification est aussi le
moment ou il est obligé d’avancer à visage découvert. Il ne peut plus passer
sous les radars après une performance si choquante.
P.M.
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