jeudi 28 février 2019

Ce drame qui se joue sous nos yeux mais que la majorité de la population française ne veut pas voir : la destruction, par l’actuel gouvernement, de la Sécurité Sociale, pilier du modèle social français issu du Conseil National de la Résistance.

     Le premier coup de semonce a été donné en juillet 2018 lorsqu’un député de la majorité a déposé un amendement visant à remplacer, dans la constitution française, la mention « sécurité sociale » par « protection sociale »[1]. Pure bataille sémantique pour certains mais les mots ont bien un sens ; si la notion de sécurité sociale a bien une définition juridique qui inclut la notion de redistribution, ce n’est pas le cas de celle de protection sociale qui potentiellement  peut ouvrir la porte a des dérives importantes avec le recours au privé accru, à la manière du système anglo-saxon… Heureusement cette première tentative s’est soldée par un échec face à l’émoi suscité[2]cependant la bataille fait toujours rage. 
     Depuis lors, les attaques se sont faites constantes. Le vote du budget 2019 a été l’occasion d’une manœuvre plus que contestable : dans le but d’établir une « contribution » de l’administration de la sécurité sociale à la « réduction du déficit de l’Etat » (voté fin 2017)[3], va s’opérer un transfert de fonds issu des excédents dégagés par la sécurité sociale vers le budget général de l’Etat[4]… En effet, était prévu initialement un excédent budgétaire de 700 millions en 2019[5], une première depuis plus de 15 ans; ceci serait permis par une baisse des dépenses de santé et des dépenses sociales comme prévu dans la loi de financement de la sécurité sociale (PLSFF). Possible amélioration des infrastructures hospitalières, ouverture de nouveaux services d’urgence, augmentation du nombre de praticiens de santé, aide aux hôpitaux psychiatriques ou pour l’accueil en EPHAD… bien sûr que non, il faut bien faire encore des économies. Les mauvaises langues diront que l’on a fait, et on va encore faire des cadeaux aux plus fortunés avec la suppression de l’ISF ou la transformation du CICE très contesté en baisse de charge et faire peser le poids de ces inepties en tentant de rééquilibrer le budget général « sur le dos » douloureux des français[6]
    A l’aune de ces considérations, comment ne pas être surpris par les interventions de certains de nos gouvernants qui vantent, en discours, l’efficacité de notre service public dans son ensemble et plus particulièrement de notre système de santé tout en les attaquant « en même temps » de la pire des manières dans les faits ? Comment Macron, entre autres, peut-il se permettre d’atteindre un tel degré de cynisme et jeter ainsi, à la face de ses propres concitoyens, tant de mépris pour leur intelligence ? 
    Par exemple, lors de ses vœux du 31 décembre 2018 : « (…) nos infrastructures sont parmi les meilleures au monde, on ne paye pas ou presque la scolarité de nos enfants, on se soigne à un coût parmi les plus faibles des pays développés pour avoir accès à des médecins d’excellence, nous dépensons en fonctionnement et en investissement pour notre sphère publique plus de la moitié de ce que nous produisons chaque année. Alors, cessons… cessons de nous déconsidérer(…) »[7]. Une analyse qui semble lucide mais totalement en contradiction avec les différentes mesures mises en place depuis le début du quinquennat et qui aboutiront, si cela continue ainsi, à la disparition de ce modèle qui est justement loué. 
     Selon le même schéma, j’ai été consterné par les commentaires de certains « Foulards Rouges » lors de la manifestation du 27 janvier 2019 ; manifestation officiellement pour « défendre la démocratie et les institutions », officieusement nous pouvions y voir un soutien à l’action du président comme c’était clairement établi, avant revirement de communication, par les initiateurs  du rassemblement[8]. Parmi les présents, un chômeur ou une femme travaillant dans la petite enfance déclarant : «(…) les gens se plaignent mais nous avons le chômage, la Sécurité sociale, les allocations familiales(…) »[9]. Comme si un condamné à mort victime d’une une erreur judiciaire, en montant à l’échafaud, se mettait à applaudir et remercier le juge qui a établi la sentence et le bourreau qui va mettre fin à ses jours. Précisons les termes de cette image un peu forte ; le condamné à mort est le citoyen allant du chômeur au membre de la classe moyenne en passant par le travailleur ou salarié précaire, l’erreur de justice est l’instauration des mesures néolibérales antisociales, le juge est le président de la République, le bourreau la majorité LREM et la sentence de mort correspond à la fin de la Sécurité Sociale, seul système de santé au monde qui permet à tout citoyen de pouvoir prétendre à une prise en charge en cas de maladie grave quelle que soit l’atteinte et l’importance du traitement nécessaire (dispositif et coût).
Nous pouvons relever ici un certain nombre de mesures caractéristiques. Tout d’abord le déremboursement de plusieurs médicaments utilisés pour traiter des affections aussi importantes que la Polyarthrite Rhumatoïde, les troubles cardiaques ou encore Alzheimer[10], soi des affections chroniques et dégénérescentes conditionnant des paiements réguliers pour des patients ne pouvant souvent pas s’y soustraire ; une double peine en somme[11]. Si ces médicaments ne montrent aucune efficacité et même une trop grande dangerosité, il me semble totalement incohérent de les laisser en circulation ; pourquoi ne pas les interdire tout simplement ? Des enjeux financiers trop important ? Non, je ne peux pas penser que nos chers gouvernants soient capables d’une telle démonstration de cynisme. Aussi nous pouvons noter un certain nombre d’actes médicaux moins bien remboursés depuis le 1erjanvier 2019[12]et encore plus récemment  une augmentation des frais hospitaliers de 0,5%[13]
     Reconnaissons toutefois certaines mesures positives comme le meilleur remboursement des examens de santé obligatoire pour les enfants de moins de 6 ans  et des consultations de préventions des cancers du sein et du col de l’utérus pour les femmes de 25 ans. Ou encore cette mesure phare martelée sur tous les plateaux de télévision par les membres de l’exécutif : frais optiques, prothèses auditives et dentaires remboursées à 100%. Un réel motif de satisfaction qui sert de caution au gouvernement pour un montant de 1 milliards engagés ; montant qui semble bien dérisoire par rapport au 3,5 milliards rendus aux plus fortunés sous la forme de l’ISF ou aux plusieurs milliards du CICE transformé en baisse de charges pour les entreprises comprenant aussi les grands groupes aux bénéfices importants et aux dividendes démesurés versés aux actionnaires. Le plus drôle dans cette histoire : les mutuelles ont déjà annoncé une répercussion sur les cotisations malgré la fausse indignation de Buzyn… Le contribuable moyen est bien toujours le dindon de la farce.
     Intéressons-nous maintenant plus précisément aux Cotisations Sociales Généralisées (CSG) qui correspondent à plus de 20% du financement de la protection sociale (Sécurité Sociale et Assurance Chômage) ; sa part ayant augmentée progressivement depuis sa création en 1991 permettant ainsi de diminuer la part des cotisations sociales dans ce financement. C’est là une des premières manœuvres : faire peser de plus en plus un impôt sur le budget de la Sécurité Sociale et au regard du droit français, cet impôt n’ouvre pas droit à affiliation aux régimes sociaux ni à prestation sociale. 
Il est donc affligeant de voir qu’à chaque fois que le gouvernement veut faire mine d’écouter les revendications des français, il abaisse la CSG. Mécaniquement il semble donc y avoir un gain de pouvoir d’achat, cependant c’est bien vite oublier que cette CSG est tout simplement du pouvoir d’achat différé dans un société moderne de plus en plus touchée par les fléaux de la pollution, du stress, des scandales sanitaires et alimentaires en tout genre qui nous condamnent aux dépenses de santé de plus en plus importantes à un moment ou un autre de notre vie (hypertension, diabète, BPCO, syndromes douloureux chroniques, cancers…). Comme mentionné précédemment,  le Crédit Impôt et Compétitivité Des Entreprises transformé bientôt en baisse de cotisation pour les entreprises est un bon exemple, une belle façon de faire un énorme cadeau aux entreprises (ce qui me semblerait uniquement justifié pour les PME) tout en faisant peser de nouveau l’effort sur les contribuables en entamant violemment les ressources de son système de santé. De même, les annonces faites par Macron pour calmer la gronde des Gilets Jaunes avec notamment la suspension de la hausse de la CSG alors qu’il aurait pu indexer les retraites sur l’inflation ou revaloriser les pensions ; ou encore, ces heures supplémentaires sans impôts ni charge.  
     Une autre manière pour le gouvernement de faire d’une pierre deux coups : donner l’apparence d’une réponse aux demandes de ses concitoyens tout en concourant directement à l’affaiblissement de la protection sociale en rabotant irrémédiablement le budget et donc la pérennité  de son fonctionnement. Avec ces dirigeants, la maxime « quand on veut tuer son chien on dit qu’il a la rage » pourrait être remplacée par une autre bien plus immorale « quand on veut tuer son chien on dit qu’on l’adore mais on lui inocule secrètement la rage ». Nous avons un magnifique système public de santé en France, et bien appliquons nous à le détruire à petit feu avant d’expliquer qu’il ne fonctionne plus correctement et qu’il faut radicalement en changer…  pour le privé bien sûr !
     Je ne comprends toujours pas pourquoi ces attaques répétées ainsi que les difficultés rencontrées au quotidien par le personnel de santé ne font pas la une de tous les journaux télévisés tous les jours de l’année. Suicides de médecins, grève de la faim en hôpital psychiatrique, locaux vétustes ne permettant pas d’accueillir les patients dans de bonnes conditions, services d’urgences saturés, fermetures de maternités… autant d’exemples bien vite évoqués et surtout bien vite oubliés, les conséquences sont pourtant dramatiques car des vies sont directement menacées. Malheureusement tous ces professionnels ne peuvent même pas se faire réellement entendre dans la rue (ou seulement ponctuellement), car, pour des questions éthiques, il est impossible de laisser trop longtemps les malades sans soins. Tous les citoyens devraient se saisir de ce combat pour protéger les fondations de notre société française ; ce sont les vies de nos enfants, de nos parents, de nos proches, nos vies à tous qui sont en jeu.
     Peut-être cette indifférence,  ce déni de réalité,  cette folie sont-ils constitutifs de la nature humaine ; on ne se rend compte de l’importance d’un bien ou d’un service que lorsqu’on en perd l’usage. Et bien il ne reste plus qu’à attendre tranquillement car si cela continue, nous nous rendrons bientôt à l’évidence, la nécessité vitale de ce dispositif extraordinaire nous sautera aux yeux, cependant il sera trop tard, à ce moment là nous aurons bien perdu notre chère Sécurité Sociale.

P.M.





Pourquoi je ne voterai pas à l’élection présidentielle de 2022

Dimanche 10 avril 2022 je ne serai pas en déplacement, j’aurai la capacité de me rendre au bureau de vote, je ne me désintéresse pas du tout...