mardi 9 juillet 2019

Traitement raisonné et naturel de l’information : essence de tout processus vital.

Cette réflexion est tout à fait personnelle et ne repose sur aucune expertise. Il est plus question d’intuition et de spéculation que de connaissances pointues, ce qui rend cet écrit parfaitement critiquable et sans aucun doute contestable.

     J’entends ici par « processus vital », tout mécanisme nécessaire à l’émergence, au maintien en équilibre et à la transmission de la vie ; que ce soit au niveau physiologique, biologique, social ou même politique. A toutes ces échelles nous pouvons nous rendre compte de l’importance du « traitement de l’information ». On peut définir cette notion comme l’exploitation d’un certains nombres de données nécessaires à l’élaboration d’un plan d’action en prise directe avec le réel, le monde matériel. Pour cela plusieurs étapes sont indispensables ; tout d’abord il s’agit d’accéder aux informations, ensuite de choisir de manière pertinente le ou les informations utiles, puis de les intégrer au système afin que celui-ci puisse finalement assurer son développement et engendrer une forme de transmission et de continuité. Ces mêmes informations ainsi modifiées s’inscrivent alors dans un nouveau système plus complexe. L’un des meilleurs exemple se trouve au niveau cellulaire avec l’expression génétique qui correspond à l’ensemble des processus par lesquels un gène est transcrit en ARN messager et ce dernier traduit en protéine (Le Petit Robert 2013). C’est la raison pour laquelle je parle ici de traitement « naturel », dans le sens d’automatique, n’obéissant à aucune volonté propre ou connue, une sorte d’alchimie spatiale et temporelle conditionnée par une énergie originelle dont les plus grands astrophysiciens  et spécialistes de physique quantique n’ont pas encore pu définir la teneur. L’échelle qui va m’intéresser pourtant est l’échelle de l’être humain ; en effet, à ce niveau, s’opère une certaine rupture qui nécessite l’emploi de l’adjectif « raisonné ». En philosophie, un humain est un être doué de raison ce qui le distinguerait de l’animal. A mon sens il serait dangereux de croire que la raison peut prendre l’ascendant sur la nature « irrationnelle » ; la spécificité humaine ne peut être négligée mais elle ne doit en aucun cas se substituer au naturel. Les deux doivent cohabiter, la puissance de la raison doit accompagner cette force universelle qu’elle ne peut circonscrire ; peut-être peut-elle l’influencer mais l’humilité doit rester de rigueur si l’on ne veut pas être à l’origine d’une rupture d’équilibre dont les conséquences seraient difficilement prévisibles. Alors que dire d’un système plus complexe formé d’un agrégat de plusieurs être humains, une société en somme ; en espérant que tant d’individus raisonnables puissent s’associer pour le bien commun. Les informations à prendre en compte seraient d’ordre géopolitique, économique ou social ; le renseignement et les experts retiendraient les données pertinentes, les communiqueraient aux instances décisionnelles qui transcriraient ces analyses sous forme de nouvelles lois régissant le fonctionnement du groupe afin que celui ci puissent se développer de manière conséquente, c’est à dire toujours en poursuivant l’intérêt général dans le respect du naturel. On voit bien que c’est à l’échelon humain que l’on peut situer le moteur général du bouleversement du système global interconnecté. 
   En France et dans les sociétés capitalistes occidentales régies par un égocentrisme toujours plus prégnant, il semble judicieux de centrer la réflexion sur les ressorts du traitement de l’information chez chaque individu. Bien sûr il est totalement impossible d’être réellement exhaustif mais on pourra retenir quelques exemples assez évocateurs.    

Intelligence Artificielle et traitement de l’information

    A quel moment l’être humain peut être faillible lorsqu’il s’agit de traiter l’information ? A tout moment… Quelle que soit l’étape dans ce mécanisme, la subjectivité du sujet peut se faire jour ; en effet, en fonction de ses centres d’intérêt, de ses convictions, chaque individu va s’orienter vers certaines sources d’informations et pas d’autres. Ensuite, toujours en fonction de son système de valeur, il va choisir de discriminer les informations avant de choisir celles qu’il va intégrer à sa réflexion pour guider sa prise de décision et, surtout, sa mise en action avec l’application de celle-ci. On peut donc facilement imaginer qu’un certain nombre de facteurs puissent « faire dérailler » toute la chaîne complexe de décision : facteur psychologique, affectif ou même émotionnel. Autant de points difficiles à anticiper ;  sans parler de conditions pathologiques qui pourraient être reconnue très longtemps après une décision dont les effets pourraient être quasi immédiats. 
La tentation est donc forte de trouver un système infaillible, d’une rationalité à toute épreuve. C’est ce rêve qui est « vendu » avec l’avènement de l’IA et de l’importance toujours plus grande prise par les algorithmes permettant une prise de décision plus rapide exemptée de toutes les erreurs potentielles évoquées. 
Penser pouvoir éviter toutes les fautes possibles grâce à  l’IA est une illusion, c’est nier l’influence du programmeur qui retombe fatalement dans ses travers humains,  dans ses limites de jugement. Il est donc très  dangereux de parer une décision tout à fait humaine de l’apparence d’une décision résultant d’un processus de calcul infaillible  car issu de la machine. 
On pourrait qualifier ce procédé de « syndrome du magicien d’Oz » : une démonstration quasiment magique ne souffrant aucune contestation avec un architecte de chair et de sang s’afférant en coulisse… Reconnaissons toutefois l’efficacité de l’IA dans le domaine médical ou juridique ou le recoupement d’informations massives et précises est une des conditions principales d’efficience ; mais une nouvelle fois il y a toujours un chef d’orchestre humain qui précise les demandes et les critères de sélection.                                      Que dire aussi de ce fantasme (j’espère que cela en restera à ce stade) d’une IA forte capable d’apprendre seule et même de s’autogérer ; de nombreux spécialistes expliquent que nous en sommes loin et, de toute façon, quel que soit le mode opératoire ou la complexité des mécanismes, ils auront été conditionnés au préalable par un humain. Il est donc totalement illusoire de penser que tout cela sera une des réponses à nos limites. Nous allons juste faire face, à l’avenir, à des injonctions qui seront reconnues comme infaillibles alors qu’elles émanent en fait d’un être tout à fait faillible par essence… Un problème majeur émerge : on se prive, par ce procédé, de la possibilité de corriger une erreur dans un jugement qui sera reconnu comme incontestable par une machine. On se prive aussi d’une qualité typiquement humaine : l’instinct ; cette capacité à intégrer l’incertitude au processus décisionnel, la possibilité de la sérendipité ; cela serait la fin de l’erreur positive qui a maintes fois conditionné de grandes avancées empiriques.

Instinct, intuition, prospective et traitement de l’information.

    L’instinct comme « faculté naturelle de sentir de pressentir, de deviner » (le Petit Robert 2013) pourrait être une simple vitesse de réflexion qui dépasse l’entendement. Quelque chose qui n’est pas mesurable, donc qui semble inexistant. Une capacité à discriminer, à choisir les informations pertinentes dans l’instant et parfois inconsciemment. Un de ces concepts qui reste obscur parce que la science n’a pas encore réussi à l’expliquer, à s’en emparer. C’est là l’erreur des tenants d’un certain naturalisme qui s’imaginent que l’instinct est un don qui se révèlera en fonction des circonstances, or, je  pense que l’instinct se travaille, se cultive dans tous les domaines avec la passion de la décision réfléchie incessante. Tout doit être matière à réflexion : le moindre geste, le moindre mot, le ton, le moment choisi de l’action… Chaque geste est signifiant ; les gens le savent et le minorent ou ne le comprennent pas.  Cela ne me semble pas une qualité totale, elle est particulière pour chaque domaine. Cela pourrait expliquer le pouvoir parfois vu comme mystique de certaines personnes se disant « voyante » ou  autres « mentalistes » réputés capable de lire dans les pensées alors que dans ces deux cas il me semble qu’il s’agit tout simplement de la capacité surdéveloppée à saisir une information à lire un comportement, une réaction totalement insignifiante pour la majorité des individus.  
La grande question : quelle information dois-je juger indispensable pour déterminer ma prise de position et quel ordre de priorité et d’importance dans le traitement de ces informations, système complexe s’il en est. L’instinct devrait ainsi se former par la curiosité, l’intérêt (au sens d’attention) pour toute chose environnante. Passé le stade de la sidération occasionnée par une saturation d’informations, la capacité à prendre l’information juste se verra décuplée à force de répétition. Cela pourrait expliquer le génie de certains individus ayant des aptitudes de calcul extraordinaires ou capables de reproduire de manière picturale la complexité d’un paysage à la manière d’un photographe ; des êtres animés par une sorte d’obsession, de compétence infinie à se concentrer sur un domaine comme les chiffres ou la représentation d’objets.  
 Je définirais ici l’intuition comme une forme d’instinct qu’un être est capable d’inscrire dans un temps plus long et dans un espace plus étendu, qui ne se cantonne pas à une action directe voire soudaine mais plutôt qu’il est possible de mobiliser pour une prise de décision différée dans le temps, pour un enchainement d’actions. Cela appelle à une autre capacité de raisonnement toujours impossible à déterminer précisément mais qui conditionne l’intégration mentale de différents scénarios possible et cohérents tout en les triant instantanément pour retenir le plus plausible car intégrant le plus de variables. En admettant qu’il soit possible de mobiliser cette capacité sur un temps très long c’est à dire en étant capable de ne jamais dévier du réel ou réalisme, de ne jamais inclure dans le raisonnement de données « parasites », on trouve alors toutes les dispositions d’un esprit visionnaire capable d’anticiper jusqu’aux grandes évolutions systémiques mondiales. La prospective est alors d’une acuité rare et souvent déconcertante pour les contemporains. Certains intellectuels peuvent ainsi être critiqués, raillés voir méprisés de leur vivant avant que l’avenir ne leur donne raison. Le même processus peut d’ailleurs être identifié dans la démarche artistique.

Démarche artistique et traitement de l’information.

    On ne compte plus les références faites de nos jours aux œuvres d’Aldous Huxley ou de George Orwell qui semblent avoir su disséquer leur avenir et donc notre présent. On peut tout de même considérer que le risque intellectuel était moindre par rapport à un sociologue ou un philosophe car le roman fait passer une vision, une critique tout en permettant de se réclamer de la « simple » fiction ne nécessitant pas vérification. Je ne pense pas qu’il y ait là une quelconque forme de volonté de préservation pour ces individus dont l’œuvre littéraire ne se cantonne pas à cet unique domaine ; selon moi il est plutôt question de trouver le juste moyen d’expression pour se faire comprendre. Selon Umberto Eco « chaque écrivain raconte toujours une même obsession » ( Télérama en 2003) et, cité par Myriem Bouzaher dans la compagnie des auteurs du 05/10/2015 sur France culture, il disait : « tout auteur est un dieu désespéré qui espère recréer un jour le monde qui est la bible ». J’interprète cela comme la métaphore d’une volonté artistique de créer une fiction originelle regroupant tous les aspects du monde, à la manière d’Homer avec l’Iliade et l’Odyssée. Ecrire pour remodeler un monde qui lui serait étranger, non conforme à ses idéaux, ses principes ; réparer l’injustice du réel. Démarche que l’ont peut tout à fait retrouver chez un peintre ou un musicien. 
   Je vois dans l’acte de création au sens artistique du terme, la démarche de ceux qui  ont une lecture du monde particulière et cherche seulement à la retranscrire, à se faire comprendre en jouant d’un moyen d’expression atypique  en espérant trouver un interlocuteur bienveillant et surtout réceptif. Peut-être espèrent-ils que la singularité adoucisse le jugement ; je pense plutôt qu’ils n’en on pas le choix ; comme s’ils ne pouvaient pas exprimer leur monde intérieur d’une autre manière. Le désespoir gagnant nombre d’artistes comme Charles Baudelaire ou Vincent Van Gogh, n’ayant pas eu la reconnaissance escomptée à leur époque, pourrait s’expliquer par le sentiment d’être incompris ; comme s’ils étaient incapables de communiquer, de se faire entendre. Une rupture totale dans le passage de l’information, une analyse du monde qui ne serait pas reconnue à sa juste valeur.  D’où la nécessité viscérale pour certains d’obtenir le succès, preuve qu’ils seraient ainsi entendus. Par contre il est difficile de savoir si la démarche relève de l’exercice égocentré ou d’une volonté peut-être secrète de changer le monde. Ils ont bien sélectionné l’information, ont traduit leur vision à leur manière et la reconnaissance du public serait alors signe d’aboutissement de la démarche ? Mais quel objectif est poursuivi finalement?  On peut craindre que le « grand artiste » qui vit de son art ne soit un individu qui ait réussi à s’accommoder avec les malheurs du monde ou à y être devenu indifférent. Les messages sont subliminaux et l’action sur le réel paraît accessoire ou pas directement recherchée. A l’inverse des artistes qui lisent le monde et n’ont pas la prétention de le changer, certains individus ont non seulement cette prétention mais aussi ce pouvoir. Ce sont les politiciens au gouvernement dont toutes les décisions ont un impact direct sur nos conditions de vie. J’aimerai qu’ils s’en tiennent aux faits et au bon sens ; cependant, il est maintenant de notoriété publique que ces gens ne s’embarrassent même plus de la vérité factuelle.    

Politique, écologie et traitement de l’information

   Voilà mon analyse concernant la chaîne de traitement de l’information qui va des constats d’experts souvent en lien avec le personnel politique au pouvoir jusqu’au citoyen lambda, dont je fais partie, en passant par le prisme de lecture des organismes médiatiques.
     Il serait bien inutile de mettre en cause les compétences des experts divers et variés choisis par les instances gouvernementales afin de dresser les constats nécessaires à leur prise de décision. Les résultats des différentes études sont souvent très pertinents et difficilement contestables compte tenu du temps et des moyens consacrés. Cependant les premiers doutes peuvent naître dès cette étape ; tous ces experts tiennent à mettre en avant leur indépendance cependant entre amitiés plus ou moins connues, autocensure pour préserver sa carrière et volonté de se faire bien voir du pouvoir, les motifs de biais ne manquent pas. Deux exemples parlants peuvent illustrer cela ; tout d’abord le rapport CAP 2022 contesté par certains membres du comité de rédaction et même qualifié de « jeu de dupes » comme le rapporte Médiapart à ce propos[1]ou encore les propres garants du grand débat qui émettent des réserves quant à la pertinence du déroulement de l’exercice[2]. On voit déjà que les motifs de réserve quant à la totale objectivité sont bien présents. 
    Les informations présentes dans les différents rapports sont alors reçues par les décideurs publics qui vont alors choisir de distiller des éléments de langage sur les différents plateaux de télévision.  D’ailleurs il y a toujours cette figure imposée du député de la majorité bien intentionné qui explique qu’il ne va pas s’étendre sur un sujet trop « technique » qui troublerait sinon le téléspectateur ou le lecteur sans doute trop idiot pour comprendre. A mon sens deux interprétations sont possibles : ce député ne maîtrise pas lui même ce domaine et doit disserter sans aucune compétence réelle en la matière ou bien le sujet est par essence problématique et il essaie d’épurer un discours qui ne pourrait être toléré par un citoyen soucieux de l’intérêt général. 
      A ce stade, impossible de parler de traitement de l’information sans évoquer les Médias.  Pour ce qui est des médias dominants, ils se meuvent, lorsqu’il y a péril en la demeure élyséenne, en porte parole du gouvernement. Par exemple lors  de la restitution des conclusions du grand débat où la parole du gouvernement a été rapportée pendant toute la semaine suivant la restitution des conclusions du premier ministre sans jamais mettre en doute la vérité déformée des chiffres avancés (à l’exception du Monde qui a sorti un article dès le lendemain) ou lorsque certaines chaînes de télévision ont eu un comportement plus que douteux dans le traitement des images pendant les manifestations des gilets jaunes (pancarte effacée sur France 3[3], problème de localisation des images sur BFMTV[4]) ; ou encore la focale mise sur les « dérapages » minoritaires de ces manifestants ou les fausses nouvelles macronistes répertoriées sur le site Les Crises[5]dans le but de discréditer tout le mouvement. Chose assez paradoxale lorsque l’on sait que tous les éditorialistes « mainstream » bondissent souvent et appellent à la caricature lorsqu’un citoyen évoque le phénomène du « tous pourris » pour caractériser les politiques ou les journalistes. En somme, ils ne s’appliquent même pas cette honnêteté intellectuelle qu’ils réclament aux autres… Sans la complicité, peut-être inconsciente pour certains (accordons le bénéfice du doute) mais réelle, aucune possibilité d’allumer des contre feux médiatiques ou de lancer des ballons d’essai pour tester l’opinion de manière grossière. Peut-être ces professionnels s’accommodent-ils d’un haut degré d’injustice pour protéger ce système qui les nourrit. Que cela se fasse n’est pas illégal, mais le rôle des médias devrait être de toujours décrypter les agissements et actions des instances gouvernementales pour que nous puissions agir et voter ou non en réelle connaissance de cause. J’invite d’ailleurs vivement, pour ceux qui ne l’auraient pas encore fait à visionner le documentaire de Serge Halimi, Les nouveaux chiens de garde et à lire les ouvrages Crépuscules (Au diable Vauvert) et Les réseaux secrets de Macron  (Stock) de Juan Branco et Marc Endeweld.
      Donc, passées au tamis des experts, des politiques puis des médias, certaines informations sensibles partiellement ou totalement déformées arrivent alors jusqu’au citoyen qui pourra analyser les données, en tirer ses propres conclusions et éventuellement contester ; pourtant rien ne changera plus car tout s’est joué en amont… de toute façon, avec un tel traitement, il est illusoire de croire que le concitoyen français va être informé de manière honnête, c’est à dire de façon la plus objective possible au moins sur le déroulement des faits. On peut résumer ainsi : le gouvernement prend des décisions quant à notre avenir en s’appuyant sur des analyses d’experts qu’ils ont eux-mêmes mandatés, selon un agenda qu’il leur est propre en choisissant de nous distiller par l’intermédiaire des médias traditionnels, généralement complaisants, les conclusions sans appels de leur réflexion et les actions qui en découlent. Il y a donc une manière assez cynique de faire croire que l’opinion publique compte tout en la façonnant insidieusement par le mensonge ou au moins la manipulation. On peut aussi ajouter la rétention d’information comme cela a été de nouveau démontré par Médiapart suite à l’incendie de Notre Dame : une pollution au plomb qui explose toutes les normes sanitaires et dont les riverains n’ont même pas été informés alors que leur vie est directement en jeu[6]. Il ne semble pas excessif dans ce cas de parler d’Etat criminel.
Pour être juste, reconnaissons que certains journalistes des médias à « grande visibilité », que ce soit sur le service publique ou dans les rédactions de groupe de presse détenus par des intérêts privés, montrent une grande éthique de travail. Par exemple Elise Lucet sur France 2 dont  les enquêtes sont réellement d’utilité publique ou encore Ariane Chemin à l’origine des premières révélations sur l’affaire Benalla ; ce qui lui a d’ailleurs valu une convocation par la DGSI. IL ne faut donc pas faire de généralité et on peut espérer que certains éditorialistes se découvriront ou retrouveront enfin une éthique personnelle et professionnelle naissante ou abandonnée depuis longtemps.   
D’ailleurs personne ne peut revendiquer une totale objectivité mais on peut regretter une forme de distorsion du réel par manque de pluralisme des opinions sur les médias traditionnels. Il semble exister un déséquilibre clair qui penche toujours vers le discours dominant.  Heureusement il existe d’autres moyens de s’informer s’il on veut avoir un éclairage différent, nombre de médias indépendants ou alternatifs font un travail remarquables. Sans être exhaustif je citerais pour la presse écrite : Le Canard enchainé, le Monde diplomatique et le Journal de la décroissance ; pour les sites internet : Acrimed, Les crises, Médiapart  et Lundimatin et enfin pour les webtélés : le Média, Thinkerview, l’émission de débat de Frédérique Taddeï sur RT : « Interdit d’interdire » et le nouveau projet d'Aude Lancelin: QG.  Je pense que pour avoir une vision claire, il est nécessaire de s’appuyer sur ces médias alternatifs mais il est indispensable de ne pas se couper des médias traditionnels pour garder une image nette du discours dominant. Le Figaro, le Monde, Libération, le Point, L’Obs, l’Express, le Parisien, le Journal du Dimanche, La tribune, les Echos, LCI, Cnews, France 2, TF1, BFMTV… sont autant de témoins précieux ; et, pour les plus rigoureux, il est même nécessaire de garder un œil sur d’autres  titres aussi riches en enseignement pour qui veut balayer assez largement le spectre des idéologies qui traversent notre société : Causeurs et Valeurs actuelles.
    Petite précision concernant le concept de discours dominant. Je le définirais comme la répétition incessante et impossible à critiquer, sous peine d’être taxé d’ignorant ou d’utopiste, de la litanie progressiste appuyée sur l’unique possibilité de l’économie de marché et de l’idéologie libérale appliquée à tous les aspects de la société. Ce type de discours, surtout pour le versant économique, est le reflet de la relation incestueuse entretenue entre les « mondes » médiatiques, financiers et politiques. Ceux-ci devraient évoluer indépendamment les uns des autres avec des contacts toujours mesurés au lieu de s’entremêler comme c’est le cas actuellement. Pour ceux qui auraient encore quelques doutes, il suffit d’avoir une approche très factuelle en notant plusieurs informations déjà bien connues. Tout d’abord le fait qu’une dizaine de milliardaires possède la plus grande partie des médias d’influence français[7] ; comment oser avancer ensuite que ces émissions de télévision, ces journaux et ces radios feraient preuve d’une totale objectivité et pourraient être réellement critiques envers leurs propres patrons ainsi que leurs réseaux? Ensuite, l’existence  de réunions  que ce soit à l’échelon national avec les « dîners du Siècle » qui réunissent régulièrement patrons du CAC 40, bureaucrates, politiciens de tous bords et décideurs médiatiques comme en témoigne le Monde diplomatique [8] ; ou à l’échelon international avec les fameuses rencontres du groupe Bilderberg[9]où se retrouvent décideurs politiques et patrons de grands groupes internationaux, et comme l’explique Thierry de Montbrial qui en a fait partie pendant près de quarante ans cité par Les Echos[10], « l’objectif  était de former un cercle d’influence puissant dans les domaines économique et financier, pour faire face à la menace communiste ». On se doute que l’objectif a évolué avec le passage du temps mais on peut se douter que le but n’est  pas de concourir à l’amélioration des conditions de vie des travailleurs précaires…  Bien sûr il n’y a toujours rien d’illégal dans ces différentes démarches et il me semble qu’il s’agit tout simplement d’échanges entre individus partageant des convictions proches et voulant préserver des intérêts privés convergents ; je questionnerais plutôt la moralité dans ce cas, l’éthique et l’honnêteté d’un personnel politique censé protéger avant tout le bien commun et assurer les meilleurs conditions de vie à sa population. En tant que citoyen français, comment est-il possible d’espérer quoi que ce soit de nos élites politiques plus occupées à développer ad vitam eternam l’économie de marché et à entretenir de bonnes relations avec les grands patrons alors que le système capitaliste mondial a déjà donné toutes les preuves d’une incapacité totale à prendre en considération les problèmes majeurs des inégalités et de préservation des écosytèmes.      

    Maintenant, pour illustrer ce que je qualifie de distorsion du réel, prenons un exemple concret de politique générale en France, associée à la question du nucléaire. Problème qui engage directement notre futur car il y a un impact écologique direct et il permet de démontrer largement la mauvaise foi et l’irresponsabilité de nos gouvernants. 
    Première information : un gouvernement qui ne jure que par les nouvelles technologies et la numérisation de la majorité des services comme le démontre ce fameux fond d’investissement censé être alimenté par la vente d’ADP à hauteur de 11 milliards d’euros. Nous pouvons facilement en conclure que pour assurer un avenir technologique basé sur l’IA, le tout électrique, le développement des réseaux 5G, la dématérialisation, la robotisation et j’en passe, la demande en énergie électrique va exploser.
    Deuxième information : avec l’arrêt des dernières centrales à charbon, la sortie du nucléaire devenu réduction du nucléaire et l’incapacité pour les sources d’énergie renouvelable (hydraulique, éolienne, solaire, géothermique, houlomotrice, marémotrice ou issue de la biomasse) de remplacer à court terme ces deux sources d’énergie[11], il semble impossible de répondre à une importante hausse de la demande. 
    Troisième information : des installations nucléaires dont la sécurité laisse à désirer comme le montrent les intrusions sur site réalisées par des activistes[12], l’incapacité d’EDF à tenir ses engagements, notamment sur l’EPR de Flamanville avec les trop régulières mises en cause par l’Autorité de la Sureté Nucléaire (cuve défectueuse en 2015[13], soudures en 2019[14]) et plus grave encore les signes de contamination relevés récemment sur notre territoire dans la Loire[15]
    Quatrième information : les aléas climatiques et géologiques qui rendent de plus en plus fréquentes les catastrophes naturelles ayant un impact direct sur des sites sensibles ; la sécheresse qui rend difficile le refroidissement des réacteurs par manque d’eau et nécessite parfois l’arrêt des centrales[16]au moment où la demande énergétique est accrue pour l’utilisation des ventilateurs, de la climatisation et autres ustensiles de refroidissement[17] ; les séismes qui pourrait fragiliser directement les structures[18]ou encore  les variations de température toujours plus importantes vers les extrêmes ce qui ne peut que mettre en cause l’intégrité du réseau dans son ensemble. Pour cela aucun besoin d’expertise il s’agit de mécanique de base ; tout matériau avec ses caractéristiques propres à un seuil de résistance à la contrainte, que ce soit en terme de température ou de pression subie. Le RTE est d’ailleurs souvent obligé de rassurer à ce propos[19]même si l’été il est de moins en moins rare de voir des panneaux électriques prendre feu comme à la gare Montparnasse.  
  Cinquième information : le problème de l’enfouissement qui n’a toujours pas été tranché et l’impossibilité de prévoir les conséquences géologiques et environnementales à long terme. 
   Sixième information : la distribution de pastilles d’iode dès septembre 2019 dans les communes à proximité des 19 centrales exploitées par EDF dans un rayon de 20 km au lieu de 10 km auparavant. Le Point rappelle d’ailleurs que « la prise d’iode stable permet de protéger la thyroïde contre les effets des rejets d’iode radioactif qui peuvent intervenir en cas d’accident nucléaire »[20]. S’il était possible d’avoir des doutes quant aux risques énoncés dans les informations précédentes, je pense qu’ils sont ici levés… 
    Il suffit de recouper ces différentes informations pour avoir un tableau général assez affligeant : compte tenu de l’instabilité du climat, nous avons un gouvernement incapable de prévoir l’ampleur des catastrophes à venir, incapable donc de garantir la sécurité de ses citoyens sans une sortie rapide du nucléaire, incapable de garantir une offre énergétique accrue à court terme et pourtant qui ose nous vendre ce coup de communication, ce mirage technologique visant à faire rêver le crédule. Il s’agit d’un cas d’école d’injonction paradoxale ; une simple question d’objectifs en inadéquation totale avec les ressources disponibles d’énergie. Ce constat devrait frapper tout le monde cependant, il n’est quasiment jamais évoqué…
  
    Pour tout individu appartenant à la masse des représentés sans droit à la parole directe, il est nécessaire de retrouver une qualité de citoyen responsable, au sens platonicien du terme, c’est à dire qui voudrait  d’une manière ou d’une autre œuvrer pour le bien de la cité, de son pays, pour l’intérêt général. Il y a urgence pour les gens comme moi, qui sont encore, pour le moment, attachés au rôle de l’Etat qui ne doit en aucun cas abandonner son rôle de protection de nos concitoyens, sa mission de service public de santé, d’éducation et de sécurité plus générale ; il faut pour cela être réellement informé et cette bataille pour l’information juste est tout simplement vitale.


P.M.




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