jeudi 19 avril 2018

Effondrement politique le 15 avril 2018 : comment Macron a totalement discrédité la fonction présidentielle.

     Personne ne pouvait imaginer qu’il était possible de faire mieux que Hollande et son concept de « président normal » ; c’est pourtant chose faite avec Macron que l’on pourra dorénavant associer à l’image d’un « président anormal ». Plenel et Bourdin ont largement contribué à ternir le rôle de chef de l’état à base d’invectives, de conseils donnés et de familiarités. Il serait d’ailleurs bien malvenu de condamner les deux journalistes pour s’en être tenus à leurs principes, pour ne pas avoir dérogé aux règles journalistiques qu’ils se sont eux-mêmes fixés. Ils ont parfaitement joué leur partition, il était d’ailleurs plutôt plaisant de voir un imposteur se réveiller après son rêve jupitérien. Il est toujours bon de rappeler qu’aucun individu ne doit pouvoir se croire supérieur à un seul de ses pairs, quelle que soit la raison.
     Il est tout de même étonnant d’apprendre que l’Elysée a choisi les interlocuteurs et le format de l’entretien, ce n’était donc pas un aveu d’humilité de la part du chef de l’état (en est-il seulement capable ?) mais plutôt une stratégie médiatique savamment orchestrée. Mais dans quel but ? Comment comprendre qu’il détruise en quelques heures l’image jupitérienne qu’il s’est évertué à installer depuis le début de son mandat ?
Certains parlerons de souplesse intellectuelle, je parlerai d’inconstance ; certains évoqueront une vision stratégique, j’évoquerai une absence de fierté, une capacité à renier tous ses principes pour la poursuite d’un objectif politique. Il a bien fait la démonstration que la fin justifiait tous les moyens ; une fin toujours pas clairement établie, définie. Cet homme ne me paraît pas digne de confiance, on peut respecter quelqu’un sans adhérer à ses idées mais le respect se gagne honnêtement par des actes et par l’exemplarité ; il ne se décrète pas par ordonnance, ne se gagne pas par la manipulation d’image au nom d’une sacro sainte intelligence ou d’un idéal de pragmatisme qui pourraient justifier les plus infâmes bassesses. A mon sens il se sent acculé par la gronde sociale qui prend de l’ampleur chez les jeunes. La jeunesse est l’expression, à l’échelle humaine, de l’entropie universelle, une tendance au désordre intérieur qu’il est difficile d’endiguer et illusoire de vouloir contrôler ou diriger. Cette offensive médiatique m’a semblé aussi efficace que de vouloir arrêter un torrent millénaire à l’aide d’une digue de quelques centimètres.   En tentant de séduire les nouvelles générations pour calmer l’ardeur estudiantine et en revêtant son costume de dirigeant de « start-up » abordable il leur a seulement prêté le flanc en justifiant des débordements futurs.  De plus, n’a-t-il pas inquiété, voir effrayé, son élite chérie dont les membres sont plus conservateurs qu’ils ne le disent malgré toutes les mélopées servies  sur les plateaux et dans les conférences dites « progressistes »  ? Ne sont-ils pas les plus dignes représentants de cette tradition élitiste française à l’origine de la reproduction des inégalités sociales ?  « L’en-même-temps-tisme » atteint ses limites. Heureusement, il subsiste quelques journalistes pour crier au « coup de génie médiatique » au « combat viril » ; je pense plutôt que l’épée de Damoclès s’est abattue sur la figure présidentielle sans que les conséquences directes ne puissent être prédites. Il est difficile de savoir combien de temps pourra durer la mascarade macronienne, cette religion du nouveau qui devient, par manque de perspectives, religion du pire. A force de louvoiements intellectuels la bipolarité réelle guette dangereusement et la confiance des français risque de s’éroder de manière inéluctable. Personnellement, je trouve profondément anxiogène le fait d’avoir à la tête de l’état quelqu’un qui peut contredire dans les faits tout ce qu’il déclare par ailleurs dans le but de servir des intérêts que lui seul connaît… et que dire de sa qualité de spécialiste des fausses nouvelles, lui  qui propose de rédiger une loi sur les « fake news » ? (déclarations concernant la présence américaine prolongée en Syrie ou la ZAD de Notre Dame des Landes démenties dès le lendemain) Cynique n’est-il pas ?
     Espérer camoufler une accumulation de décisions hiérarchiques arbitraires et une autorité illégitime derrière le filtre d’un entretien irrévérencieux c’est sous-estimer grandement la nature humaine qui ne peut jamais se satisfaire de l’injustice réelle ressentie. Pour reprendre ce terme « sous-estimer », il est à mon sens l’expression du drame de la présidence Macron : quelqu’un qui n’estime que sa propre personne est conduit fatalement à sous-estimer tout le monde…

P.M.


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