On peut remarquer chez chacun d’eux une absence d’autocontrôle, une incapacité maladive à maîtriser ses envies, ses désirs. J’ai la nette impression que tous ces individus, au cours de leur vie d’adulte, ignorent certains principes fondamentaux qu’ils ont appris, je l’espère, lors de leur prime jeunesse. Il semblerait que nous assistions en effet à la désintégration progressive du principe de « limite » pourtant indispensable à développer dès le plus jeune âge dans tout mode d’éducation. N’en déplaise aux partisans d’un « progressisme débridée », «de la jouissance sans entrave » ou encore de l’abandon des règles[1], le fait de poser des limites n’est pas incompatible avec le dépassement de soi. Il suffit de déterminer raisonnablement à quels champs s’appliquent ces limites ; c’est lors de cette réflexion que la maîtrise de ses désirs prend tout son sens.
Dans les cas qui nous intéressent, il semblerait que posséder un certain pouvoir, détenir des richesses conséquentes et bénéficier d’une reconnaissance sociale importante (ces trois facteurs étant d’ailleurs étroitement liés) rendent légitime un manque de mesure inacceptable pour le commun des mortels. Comment expliquer que des individus ayant de telles responsabilités et un devoir d’exemplarité eu égard de leur influence réelle sur les plus jeunes générations, puissent minimiser des « affaires » pouvant relevées du judiciaire au plus haut sommet de l’Etat, puissent se livrer à un déchainement de violence totalement disproportionnée ou puissent profiter d’une situation de faiblesse psychologique pour obtenir des faveurs sexuelles ? A quel moment la morale et l’éthique personnelle dysfonctionnent au point que surviennent ce genre de dérives ? Bien sûr, il convient de bien discriminer ces différents forfaits afin d’appliquer la sanction adéquate. Je ne comprends d’ailleurs pas que des rappeurs qui confondent un hall d’aéroport avec un ring de combat libre puissent être incarcérés pendant 3 semaines alors que le proche d’un président, accusé de violence en réunion par unepersonne chargée d’une mission de service publique, usurpation de fonctions, port illégal d’insignes réservés à l’autorité publique et complicité de détournement d’images issues d’un système de vidéoprotection, dont la femme se soustrait à la justice[2]et qui dissimule sciemment des preuves aux enquêteurs[3], parte tranquillement en vacances à l’étranger… parfois la justice a ses raisons que ma raison ignore.
Pourtant, dans notre société, c’est bien la loi qui est censée revêtir le rôle de garde-fou ; tomber sous le coup du système judiciaire c’est, normalement, avoir atteint la limite à ne pas dépasser, avoir fait céder les digues de la réflexion personnelle pour des raisons comme la non intégration des règles élémentaires de vie en société, une pathologie mentale, un état de décrochage émotionnel ou autre condition incontrôlable de perte de repères. Vouloir agir vis à vis de la loi comme un enfant à l’égard de ses parents (dissimuler, tester, passer outre) c’est inconsciemment approcher l’état de folie. Le législatif n’a pas pour vocation de nous éduquer sinon il faudrait être allé de nombreuses fois en prison avant de devenir raisonnable. Prendre la loi comme seule référence pour ses actions au lieu de sa propre conscience, c’est accorder à cette loi un rôle qui n’est pas le sien. Comme si ces individus n’avaient pas passé le stade de développement psychologique d’un adolescent. La justice remplace leur conscience, c’est à dire qu’ils se déresponsabilisent totalement, ils externalisent leurs questions personnelles de morales et d’éthique à une institution qu’ils tentent en même temps de flouer par les dissimulations les plus absurdes. Ces individus justifient la réduction de nos libertés par le seul fait qu’ils soient incapables de se valoir d’un minimum de probité.
Je reconnais qu’il peut paraître compliqué d’en appeler à l’éthique, cet ensemble de valeurs propres à un milieu, un groupe, une culture et même à un individu. Certains y voient les fondements d’un autoritarisme pouvant dériver vers des situations dramatiques. Pour ne pas atteindre le point Godwin, je citerai l ‘exemple souvent repris de la Terreur ; à ceci prêt que la peine de mort à bien été abolie et qu’il suffit d’associer à ces questions de morale un certain nombre de principes fondamentaux parfaitement identifiés et normalement enseignés à l’école de la République : respect de l’autre, tolérance, solidarité et poursuite de l’intérêt général. Dès lors, chacune de nos actions peut être jugée à l’aune de ces préceptes.
Encore faudrait-il ne pas avoir la mémoire trop courte contrairement à nos décideurs : membres du gouvernement et députés perroquet de la majorité qui vont encore plus loin, en faisant mine de les honorer dans leurs discours tout en les foulant aux pieds dans les faits. Un exemple éclairant reste la déclaration faite par l’ancien ministre de l’écologie lors de sa démission[4]. Comment ces énergumènes adeptes du double discours, de la dissimulation et des démonstrations les plus éhontées d’hypocrisie, peuvent-ils espérer que nous les soutenions une seule seconde ? Certains nous voient comme « réfractaires »[5]et ne peuvent pas se limiter ; il faudrait simplement faire attention à ne pas atteindre les limites de notre tolérance.
P.M.
[1]https://www.rtl.fr/actu/politique/macron-aux-etudiants-americains-vous-n-etes-pas-obliges-de-toujours-suivre-les-regles-7793171422
[2]http://www.lepoint.fr/politique/l-incroyable-cache-cache-de-la-compagne-de-benalla-22-08-2018-2245211_20.php
[3]https://www.mediapart.fr/journal/france/300818/les-secrets-d-alexandre-benalla-sont-toujours-l-abri-et-il-le-revendique