mardi 17 juillet 2018

Cet extrémisme qui se cache sous les ors de la République.

      Aucune référence ici à l’extrémisme religieux, pas non plus aux groupuscules ou partis dits d’extrême droite ou d’extrême gauche. Il serait d’ailleurs intéressant d’établir une définition plus claire de ce dernier qualificatif. En effet, de nombreux « experts » semblent utiliser abusivement cet adjectif « extrême » pour discréditer certains mouvements ou certaines idées parfois modérés ou simplement en décalage avec la pensée dominante. Prenons un exemple assez parlant : selon le point de vue d’un politicien américain, qu’il soit du parti démocrate ou du parti républicain (droite modérée ou droite dure), un Hamon ou un Mélenchon passeront facilement pour des extrémistes de gauche, nouvelle incarnation de Chavez ou Castro en puissance ; d’un autre côté, pour un individu de sensibilité anarchiste, ces mêmes politiciens français, tous deux vouant une admiration béate au « progressisme » à tout va ne valent pas beaucoup mieux qu’un Macron ou une Le Pen. Si on ne définit pas le point de référence à partir duquel s’éloigne les extrêmes, impossible de donner une validité quelconque à cette idée d’extrémisme. 

      Je prends, pour ma part, comme point de référence un idéal humaniste basé sur le respect, à la fois de tout individu et de l’intérêt général, ainsi que sur la solidarité indispensable à la cohésion de notre société et principe fondateur du modèle social français. J’ai donc décidé d’évoquer cette idéologie qui se développait sournoisement jusqu’à maintenant. Idéologie sans doute endiguée jusque là par des pratiques, des forces et des positionnements intellectuels qui se sont trouvés paralysés subitement, en même temps que les anciens clivages politiques. Il s’agit d’un extrémisme « financier », une déclaration d’amour gouvernementale faite aux plus grandes fortunes, aux plus grands groupes : entreprises génératrices de gains faramineux et autres banques qui font offices de véritables décideurs au dessus de nos gouvernements fantoches devenus de simples exécutants. L’Assemblée nationale, le Sénat et la République française dans son ensemble se transformant à grande vitesse en des chambres d’enregistrement de mesures visant exclusivement le bien-être des plus grandes entreprises pour favoriser d’hypothétiques investissements[1]. C’est d’ailleurs l’une des plus importante fraude intellectuelle de ces dernières années : ces investissements devraient favoriser la croissance donc l’emploi et par extension les conditions de vie et le bien-être de tous les concitoyens et surtout de ceux qui sont le plus dans le besoin. Malheureusement, aucun « fléchage » de ces investissements, aucune contrainte légale établie pour ces entreprises, il faudrait donc compter sur la bonne foi de tous ces grands citoyens modèles tout à fait désintéressés[2]… D’autre part il est parfaitement reconnu par tous les progressistes que notre avenir sera amélioré et la croissance (seul indice valable pour tous ces illuminés) permise  par les sacro-saintes nouvelles technologies : un cocktail idylliques d’Intelligence Artificielle, d’algorithmes complexes, d’ordinateurs quantiques et autres dispositifs numériques et robotiques[3]. Difficile dans ce contexte de nous vendre cette idée saugrenue d’une augmentation du nombre d’emplois ; les gains de productivité étant conditionnés par des dispositifs techniques nécessitant de moins en moins de main d’œuvre et d’employés, le PDG de carrefour ou ce cher Darmanin pourrait sans doute nous le confirmer[4]

      Ce fanatisme de la finance n’est pas nouveau, feu « la dame de fer » Margaret Tatcher et feu « le franc-tireur » Ronald Reagan doivent jubiler dans leur tombe. En France cette idéologie retrouve une seconde jeunesse avec le pire ambassadeur  (ou le meilleur pour certains), notre Macron national (Manu pour les intimes) capable d’embrasser dans le discours toutes les idées, même les plus contradictoires en fonction de son auditoire ; il manie les paradoxes comme Donald Trump son hochet et il est incapable de cacher le mépris profond pour ses concitoyens sans mérite qui devraient être tirés par les « premiers de cordées ». Il est d’ailleurs capable des blagues les plus douteuses que n’aurait même pas osé un François Hollande sous acide[5]. Malheureusement pour lui et heureusement pour nous, « les faits sont têtus »  et toutes les belles annonces et prévisions ne résistent pas à l’épreuve du réel. 

      Le documentaire très partial : Macron président, la fin de l’innocencede Bertrand Delais[6]est assez éclairant quant aux fondements pseudo philosophiques de cette idéologie dangereuse. Un passage m’a profondément mis mal à l’aise, lorsque le président de la République française évoque cette idée d’ « absolu ». Il s’en donne à cœur joie, comme à son habitude, en rendant tout à fait flou, par ses explications, un concept qui devient alors englobant, qui permet d’y associer tout et son contraire. Au lieu de clarifier les choses, une nouvelle fois il sème le trouble par manque de précision : « Il n’y a plus d’aventure importante car on ne risque plus notre vie » ; « si on dit dans nos démocratie et dans nos sociétés : point besoin d’absolu, c’est même fait pour les autres, c’est limite dangereux, vous n’enlèverez pas d’autres racines d’absolu de renaître, il y a une part de ça dans l’aventure djihadiste dans nos sociétés ». « Aventure djihadiste » ? J’ai, tout d’abord trouvé le ton plus que léger pour évoquer des meurtres ignobles perpétrés contre nos concitoyens. La maladresse du propos n’a pas manqué de m’étonner, me rappelant les soucis judiciaires d’un Eric Zemmour avec son commentaire : « je respecte des gens qui meurent pour ce en quoi ils croient ». 
      Ensuite, en réfléchissant un peu plus à son propos, il m’a semblé clair que ce président cherchait à tout prix à valoriser l’absolu sans comprendre qu’il ne se décrète pas, ne s’ordonne pas, qu’il émerge effectivement lorsqu’il est bien encré dans les  consciences par l’éducation citoyenne à nos principes républicains de liberté, d’égalité et de fraternité. Principes pourtant bafoués continuellement par le pouvoir en place. Comment parler de liberté alors que l’on favorise la censure[7], qu’on inscrit des lois liberticides dans le droit commun[8], qu’Amnesty International met en garde l’état français contre des dérives dangereuses[9] ? Comment parler d’égalité quand un dispositif comme parcoursup s’avère  être un obstacle à la mobilité des étudiants venant de province ou de banlieue[10], quand la réforme de l’enseignement supérieur risque d’être le pire outil de reproduction sociale qui soit[11], quand tout le programme économique du gouvernement ne peut que concourir à l’explosion des inégalités[12] ? Comment parler de fraternité lorsque les migrants sont molestés sur le sol français par les forces de l’ordre afin de les pousser à fuir[13], quand un président de la république garde le silence si longtemps devant les appels à l’aide d’un bateau de sauvetage[14], quand ce même chef d’état laisse entendre que les ONG « font le jeu des passeurs »[15] ?  
      Il me paraît tout à fait légitime de célébrer les véritables héros ; mais il paraît inconvenant de la part d’un chef de l’état qui se respecte de laisser l’exemplarité et la défenses de nos valeurs à d’autres, il serait bon que le « premier » des français ne faillissent pas au moment de prendre ses responsabilités au quotidien devant ses concitoyens. Lorsque l’on s’intéresse aux mesures gouvernementales, l’absolu selon Macron correspond plutôt au succès économique à tout prix d’un petit nombre d’individus ayant « réussis » (par opposition à « ceux qui ne sont rien »), ces « premiers de cordée » qui représenteraient la vitrine de la France. Et pour cela, il semble tout à fait prêt à sacrifier le bien être et les conditions de vie d’une grande partie des français. Un sacrifice nécessaire selon lui dans la poursuite de cet objectif « qui nous dépasse ». Nous sommes les dommages collatéraux ; même les économistes, soutien de la première heure, donc les premiers bernés prennent leurs distances[16]. Malgré tout, il reste encore beaucoup de grenouilles disposées à être ébouillantées.

      Il est pourtant flagrant que ces intégristes libéraux créent à marche forcée les conditions de la mise à mort sociale d’une partie de plus en plus grande des français. Les lois pro entreprises sont mises en oeuvre au pas de charge mais pour le plan anti pauvreté, la réforme de l’hôpital, la réforme de la formation… attendons encore quelques mois pour au final expliquer qu’il faut couper les aides et les budgets et faire en sorte que les gens se débrouillent seuls (« se responsabilisent » en langage macronien).  Il serait bon que ce président, plus chef d’entreprise que chef d’état, comprenne que lorsqu’il fait référence à la « grandeur et à l’histoire de la France », il parle aussi et surtout de l’ensemble des français. Ce gouvernement de fétichistes du rendement, d’adorateurs du dieu argent, ces radicaux pro CAC 40 n’ont pas fini de nous plonger dans la misère. Il semble réellement vouloir la fin de l’état dans sa fonction de protection. 

      Et que dire lorsque notre santé est directement menacée par une majorité incapable de défendre les intérêts de leurs concitoyens face aux désastres écologiques et aux industries agro alimentaires dont certaines pratiques ont des conséquences mortelles. Comment ne pas privilégier la santé publique face à des considérations économiques ? Des députés LREM ont, par exemple, voté contre un amendement visant à interdire les publicités alimentaires peu saines visant les enfants et ce pour ne pas risquer de « mettre des secteurs en danger ». Leur solution : « la responsabilisation des parents ». Quelle honte de culpabiliser les parents alors qu’on dissimule délibérément des informations de premières importance (nutriscore interdit) ou qu’on laisse se propager des images volontairement erronées (publicités glorifiantes autorisées)[17]. Quel manque de courage, quelle irresponsabilité, quelle hypocrisie ; laisser notre écosystème être dévastés par l’activité de grands groupes[18], laisser les français s’empoisonner[19]tout en se présentant comme de grands défenseurs de l’écologie… 

      Espérons que tous les citoyens menacés prennent conscience qu’ils ne sont que quantité négligeable pour tous ces rapaces pourtant bien moins nombreux que nous.

      P.M.



Pourquoi je ne voterai pas à l’élection présidentielle de 2022

Dimanche 10 avril 2022 je ne serai pas en déplacement, j’aurai la capacité de me rendre au bureau de vote, je ne me désintéresse pas du tout...